(Billet 931) – La Minurso doit s’en aller car sa mission est un échec

(Billet 931) – La Minurso doit s’en aller car sa mission est un échec

Comme chaque année, depuis plusieurs années, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunira pour dire sa vérité (et pas forcément la vérité) sur la question du Sahara ; ses membres écouteront distraitement le propos de l’Envoyé spécial, puis liront approximativement le rapport du secrétaire général, et enfin voteront la résolution en pensant à autre chose. En réalité, tout le monde est las de ce problème, qui est pourtant toujours là.

En 2016, les deux anciens ministres des Affaires étrangères que furent Moulay Ahmed Laraki et Mhamed Boucetta avaient confié à Panorapost que la Minurso devait quitter le territoire national, en l’occurrence le Sahara, car elle n’avait pas rempli sa mission. Et elle n’a pas rempli sa mission du fait que le préalable à tout référendum est le recensement de la population concernée, ce qui est chose impossible car au Sahara, on ne peut dissocier un « Sahraoui » d’un « Marocain », et à Tindouf, on trouve des Maliens, des Nigériens, des Tchadiens, quelques Sahraouis, dont l’identité est jalousement conservée par les Algériens, peu soucieux de la tenue d’un recensement que par ailleurs l’ONU demande mollement.

La Minurso n’a pas rempli sa mission car le Maroc est on ne peut plus clair. En novembre 2015, le roi Mohammed VI avait affirmé et martelé que l’« Initiative (d’autonomie) est le maximum que le Maroc peut offrir (…).  Il se leurre celui qui attend du Maroc qu'il fasse une tout autre concession ». Deux ans après, le souverain insiste et verrouille : « Aucun règlement de l’affaire du Sahara n’est possible en dehors de la souveraineté pleine et entière du Maroc sur son Sahara, et en dehors de l’Initiative d’autonomie, dont la communauté internationale a reconnu le sérieux et la crédibilité ». La messe est dite et la cause, entendue.

Alors, que fait encore la Minurso sur le territoire marocain ? Et surtout, pourquoi reviendrait-il au Maroc de soumettre à référendum sa souveraineté sur le tiers de son territoire ? Pourquoi la France avait-elle pu organiser un référendum du référendum en Nouvelle-Calédonie en 1988, pourquoi décide-t-elle d’ « octroyer » le statut d’autonomie aux Corses, et pourquoi le même traitement n’est-il pas permis au Maroc ? La question est légitime, mais la réponse est évidente et tient, puisqu’il s’agit de la France, en ce vers de Jean de La Fontaine : « Selon que vous serez puissant ou misérable, la justice de cour vous rendront blanc ou noir… ».

Aujourd’hui, l’ONU est plus que jamais un « machin », pour reprendre le terme de de Gaulle. Pour être plus précis, on peut même avancer l’idée que les Nations Unies sont devenues une « machine » aux mains des Etats-Unis et de leurs amis/alliés/vassaux pour gérer et régir le monde selon leurs intérêts. Mais qui se soucie encore vraiment de l’ONU ? Les Américains mènent leurs guerres comme ils l’entendent, les Français interviennent où ils peuvent et où ils veulent, les Russes envahissent l’Ukraine et annexent un bout...

de son territoire, l’Azerbaïdjan aspire le Haut-Karabagh, Israël s’acharne sur Gaza, extermine à sa guise et éradique à tour de bras, l’UE transforme la Méditerranée en cimetière géant, les Britanniques souhaitent transférer leurs émigrés au Rwanda… et le Palais de verre est plus friable et fragile que jamais.

Alors que fait encore la Minurso sur le territoire marocain ? Pourquoi Rabat ne demande-t-il pas un autre format, alors même que l’actuel Envoyé Spécial Steffan de Mistura pense déjà à un autre cadre pour réunir le Polisario et le Maroc ? La « communauté internationale », c’est-à-dire l’Occident, d’une part et, d’autre part, la Russie et la Chine, par ailleurs antagoniques sur à peu près tout, s’entendent pour maintenir ce conflit artificiel, l’alimentant d’année en année par le vote d’une résolution de renouvellement de l’impasse.

Qu’Israël bombarde tout ce qui bouge et ce qui ne bouge pas, que l’UE laisse couler les embarcations de fortune d’infortunés Africains, que Londres veuille transférer des Afghans au Rwanda, que Julian Assange croupisse dans sa prison britannique, que les Américains bombardent qui ils veulent aux quatre coins du monde et blanchissent encore plus qu’ils ne le sont des policiers qui tirent comme au stand sur des Africains-Américains… tout cela ne dérange personne semble-t-il. Mais que les Marocains investissent des milliards sur leurs terres sahraouis, font d’un désert inhospitalier une oasis de paix et de prospérité, on leur maintient quand même une épée de Damoclès sur la tête.

Tout cela est le comble de l’injustice, du cynisme, de la loi de la jungle. Donner crédit à un régime algérien opaque et brutal, fauteur de troubles et rejeté par sa propre population, et entraver la marche vers le développement d’un royaume paisible, reconnu par tous et partout, est le signe de la déliquescence morale de l’ONU.

Que le Maroc s’occupe de reconstruire son Haouz détruit par le récent séisme qui l’a frappé, qu’il s’attelle à la préparation des CAN25 et du Mondial30, qu’il assure la protection sociale universelle de sa population, qu’il développe ses territoires, qu’il agisse et réagisse au changement climatique, qu’il déploie ses énergies renouvelables, qu’il gère son statut d’Etat exposé au phénomène migratoire… et qu’il laisse l’ONU face à ses contradictions.

Il est temps que le Maroc dise non à l’ONU, comme le préconisaient les deux diplomates cités, et qu’il fasse savoir urbi et orbi que les propos du roi Mohammed VI sur l’autonomie comme unique et ultime solution expriment la volonté de près de 40 millions de Marocains, et qu’ils ne sont pas négociables. Que l’ONU trouve une autre solution et mette au point une autre approche pour le Sahara, si elle recherche vraiment la paix, ou qu’elle continue de soutenir les contresens hérités d’une décolonisation hachurée, mais sans le Maroc.

Le référendum n'étant ainsi plus à l'ordre du jour et le cessez-le-feu ayant été rompu par le Polisario, la Minurso doit donc admettre son échec, et en conséquence quitter le territoire marocain.

Aziz Boucetta