(Billet 472) – Que les partis donnent des gages en dégageant leurs ripoux !

(Billet 472) – Que les partis donnent des gages en dégageant leurs ripoux !

2021 est là, et les élections sont à nos portes. Il semblerait qu’elle se tiendront, même avec la crise Covid qui n’en finit pas de ne pas finir… Les partis politiques, étrangement silencieux, un peu tétanisés par la situation et ignorant à peu près tout ce qu’il y a lieu de faire, entreprendront de nous enfumer avec de grands et beaux programmes électoraux et de grandes et belles envolées morales. Fort bien, alors qu’ils donnent des gages sans plus tarder, et qu’ils s‘engagent à en donner davantage plus tard !

En matière d’intégrité, la différence entre les partis se décline ainsi : ceux qui comptent beaucoup de ripoux parmi leurs ouailles et ceux qui en comptent relativement peu. Il n’existe pas de formation politique qui n’en ait pas dans ses rangs, et les chefs de partis le savent pertinemment. Ceci est d’ailleurs universel, mais ce n’est pas une raison de ne pas sévir…Qu’est-ce qu’un ripou en politique ? Un individu tombé dans les filets de la justice et condamné (même quand le jugement n’est pas définitif), ou traqué par les juges dans l’attente de procès, ou simplement affichant des signes d’enrichissement anormal et puissamment douteux.

Dans une démocratie digne de ce nom, toute personne ayant fait montre d’indélicatesse avec la loi (même pour un délit mineur du type « oubli » de déclarer son personnel à la CNSS) doit quitter ses fonctions, ou à tout le moins présenter ses excuses (le hara-kiri politique reste une option personnelle). Dans une démocratie qui se respecte et dont les leaders respectent la population, toute personne convaincue de charges de corruption doit être immédiatement suspendue dans l’attente du jugement définitif. Dans une démocratie viable, tout responsable de parti condamné doit immédiatement être exclu ou du moins délesté de toutes ses responsabilités.

Or, que voit-on dans ce pays ? Des choses qui ne feraient pas sourire le dernier des optimistes… C’est à peu près tout le code pénal qui défile sous nos yeux, crimes sexuels exceptés (sans doute par défaut de dénonciation…) : la corruption, bien évidemment, la concussion, la prévarication, le détournement, l’enrichissement aussi illicite que rapide, le conflit d’intérêt, le délit d’initié, le chantage aux documents… Comment le savoir...

? « Mais nous vivons au Maroc, nous connaissons bien notre pays », aurait répondu à la volée feu Ali Yata… et en lisant la presse, on confirme.

Pour celles et ceux qui, sceptiques et croyant encore à l’éthique de nos politiques, des procès, des condamnations, des suspensions par le ministère de l’Intérieur (qui fait, donc, souvent, le job de sévir). Nous avons donc un éventail très large d’indélicatesses, pour rester courtois… L’ancien président de la commune de Had Soualem, les anciens présidents de la Région de l’Oriental et de la commune d’Oujda, l’ancien président de la commune Menara Guéliz. Les deux premiers sont PAM et les deux seconds sont Istiqlal… L’un de ces indélicats siège à la Commission de la Justice de la Chambre des conseillers, et un autre compte parmi les dirigeants qui comptent dans son parti !

Et nous avons un ancien ministre, toujours dirigeant de son parti, soupçonné de favoritisme dans l’octroi d’un marché informatique, fort généreux au demeurant… puis un autre, suspendu au verdict d’une institution constitutionnelle, et encore, et d’autres, et ce n’est pas fini… et quand c’est fini, ça recommence !

Cela pourrait sans doute expliquer l’indifférence de l’opinion publique à l’égard de toute action ou expression politique, qui sonne faux, qui sonne creux… Les partis fonctionnent en quant à soi, sévissent rarement, regardent ailleurs en cas de vol, adoptent volontiers l’attitude de victimisation en pleurant à chaudes larmes sur leur honneur bafoué. Mais ils protègent leurs ripoux, comme leurs aînés l’ont fait avant eux et comme leurs successeurs, on l’espère, ne feront pas.

Les chefs de partis, pour ceux qui sont intègres, doivent agir par anticipation ou réagir aux condamnations. Ne pas accorder leurs investitures à des véreux ou des voyous serait un bon départ et un gage important de leur intégrité. Et comme les programmes 2021 seront des répliques de ceux de 2016, avec de menus changements, et que tous reprendront les indications du modèle de développement, quand il deviendra public…

Pour les élections à venir, et s’ils veulent assurer une participation minimum, les partis devront apporter des gages en sévissant contre leurs cadres indélicats et en examinant avec soin les futures candidatures aux candidatures.

Aziz Boucetta