(Billet 163) – Le Maghreb dans tous ses Etats…

Il existe, de par le vaste monde, une région qui est un peu sens dessus dessous en ce moment, et cette région a pour nom le Maghreb, ou l’Afrique du Nord. Dans ces contrées hospitalières, pas toujours vertes, le rouge monte au front rapidement, et les peuples qui y résident, Algériens, Tunisiens, Mauritaniens, Libyens et bien évidemment nous autres Marocains, s’énervent pour un rien, parfois pour un tout aussi. Mais tout cela est fait de manière plutôt inédite…

Ainsi donc, chez nos amis algériens, après une soixantaine d’années d’armée et d’amertume, les gens ont dit « basta ! ».  L’’Algérie est en effet le seul pays au monde à avoir été dirigée par un président à l’élocution aussi difficile que son éloquence fut, jadis, hardie, qui fait ses campagnes par le truchement d’un cadre en bois, où sa moustache de bon père regarde son troupeau bouffer sa rage froide… Une colère qui a explosé quand il a voulu rempiler, toujours assis, toujours muet, avant que le peuple ne pousse son fauteuil vers la sortie. L’Algérie est aussi le seul pays au monde où il y a risque d’élection présidentielle… sans électeurs !

La Tunisie, ce pays de braves qui bravent les dangers et ont embrasé le monde arabe, a une longueur d’avance – voire plusieurs – sur les autres pays du Maghreb en termes d’avancées sociales. Ils passent d’un extrême à l’autre, du grand Bourguiba au gland Ben Ali, d’un très vieux président, aujourd’hui défunt, à un très jeune Premier ministre, aujourd’hui défait. La Tunisie est aussi le seul pays au monde à avoir un candidat au second tour… en...

prison !

Puis la Libye… Elle a l’avantage de simplifier les choses. Durant 40 ans de kaddhafisme, il n’y avait pas d’Etat. Il n’y en a toujours pas, mais avec une féroce guerre civile en prime, menée à cause d’un maréchal arrivé sur le tard et appelé Haftar, qui fait guéguerre avec les mortels jouets à lui complaisamment prêtés par les autres amateurs de quincaillerie que sont les MBS/MBZ du Golfe, aussi mégalomanes que pyromanes.

La Mauritanie, pays du « million de poètes », est dirigée par un millier de militaires, qui ne disposent pas véritablement d'une armée. Cela ne s’invente pas mais cela existe.

Reste le Maroc. Pas de problème de chef d’Etat, mais on joue à nous faire peur en interne. Ici, les militants militent, normalement, les excités s’excitent, bruyamment, les amoureux s’aiment, illégalement, et le gouvernement ne gouverne pas, et aujourd’hui moins que jamais. On est aussi le seul pays au monde qui, avec près de 50% de la population présentant des troubles mentaux (chiffres officiels), est administré par un… psychiatre !

Mais les Maghrébins ont l’art du rebond, malgré leurs dirigeants qui ne renvoient pas toujours une image très moderne. Leurs sociétés alternent assez savamment et très régulièrement entre le Moyen-âge et la postmodernité, et le désordre commence par cet étranger fait que leur langue officielle, l'arabe classique, n'est parlée par personne au quotidien. Ces pays décidément fort généreux ont un art consommé de produire des cerveaux qu’ils offrent plus tard, très complaisamment, aux Européens, les Français en particulier. Et ils n’ont toujours pas intégré cette idée forte qu’ensemble, ils peuvent réaliser des miracles…

Aziz Boucetta