Comment acheter sûrement un logement sur plan (expert)

Comment acheter sûrement un logement sur plan (expert)

Mohamed Lazim est ingénieur d'Etat en génie civil, EHTP. Il est expert judiciaire assermenté près de la Cour d’Appel de Casablanca et membre de l’organisation internationale RICS basée à Londres. Mohamed Lazim (photo ci-après) est en outre titulaire du Diplôme français des études économiques et juridiques appliquées à la construction et à l’habitation et d'un Master « Management de projet » au collège Polytechnique de Paris. En sa qualité d'expert dans le domaine de l'immobilier, Mohamed Lazim répond à nos questions sur l'acquisition de biens immobiliers sur plan, la fameuse VEFA.

 

La vente sur plan ou VEFA (vente d'immeuble en l'état futur d'achèvement) est une pratique très répandue au Maroc, et jusque-là elle n’était soumise à aucune réglementation particulière. Le Dahir des Obligations et des Contrats régissait seul cette forme de transactions, qui repose sur le recours des promoteurs immobiliers aux avances des futurs acquéreurs afin de mobiliser des moyens financiers complémentaires, et cela au fur et à mesure de l’avancement des travaux de construction. 

Bien qu’elle comporte des risques évidents pour l’acheteur et ne repose sur aucune base juridique, cette pratique est devenue un instrument de financement incontournable pour les promoteurs en raison de la faible implication des banques dans le financement des logements.

De ce fait, et pour limiter ces risques et combler le vide législatif qui caractérise la matière, le Ministère de l’Aménagement du Territoire National, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville a déployé des efforts non négligeables pour la mise en place d’un cadre juridique afin d’encadrer la pratique de vente sur plan ; et ces efforts se sont concrétisés par l’adoption, le 3 octobre 2002, de la loi 44.00 sur la Vente d’immeuble En état Futur d’Achèvement, dont l’entrée en vigueur est intervenue le 6 novembre 2003.

La loi 44-00 s’est inspirée de l’arsenal juridique de la VEFA française. Mais, malheureusement, cette nouvelle réglementation n’a pas eu les effets escomptés. En effet, elle a été décriée pour ses conditions difficilement applicables et donc peu respectées. C’est pour cette raison qu’une nouvelle loi a été élaborée. Il s’agit de la loi 107.12 modifiant et complétant la loi 44.00, instaurée afin de mieux encadrer la pratique appelée auparavant « vente sur plan ».

L’analyse de cette loi 107-12 appelle les remarques suivantes :

 Nullité des contrats

Tout d’abord et d’après l’article 618-2, la conformité et la validité de tous les actes et de toutes les transactions consentis dans le cadre de la VEFA sont conditionnées par leurs respects aux prescriptions et dispositions de la loi 107-12. A défaut, ces actes et ces transactions sont nulles et non avenues.

En analysant cet article, nous remarquons...

que la nouvelle loi a bien prévu comme sanction la nullité des contrats qui ne respectent pas les dispositions de la loi 107-12, mais le texte n’a pas poussé le raisonnement jusqu’au bout du fait qu’il n’a pas déterminé le sort du contrat après sa nullité, ni ses conséquences et effets sur le plan juridique. Et en particulier la manière dont l’acquéreur devra restituer les avances qu’il a perçues.

 Contrat de réservation

En vertu de l’article 618-3 alinéa 3, le contrat de réservation n’est valable que pour une durée de 6 mois. Passé ce délai, la loi oblige les parties à procéder à la conclusion d’un contrat préliminaire de vente dans les termes et les conditions prévus par la même loi. A défaut, le contrat de réservation est nul et non avenu.

Par cette disposition, la loi a rendu légale la pratique du contrat de réservation, mais elle n’a pas précisé le destin du contrat de réservation après sa nullité (en cas de dépassement de 6 mois), et en particulier ceci : comment l’acquéreur pourra-t-il restituer son avance sachant que la loi n’a pas obligé les vendeurs à déposer une caution ou une autre garantie lors de la signature du contrat de réservation ?

 La possibilité de prénotation

Aux termes de l’art 618-10, si l’acquéreur a procédé au paiement d’au moins 50% du prix de vente, il pourra dans ce cas conserver son droit par le biais d’une prénotation qu’il peut requérir d’office auprès de la Conservation foncière.

Toutefois, en cas d’inscription d’une hypothèque bancaire sur le titre foncier et en cas de défaillance du vendeur, cette disposition ne procure pas, à l’acquéreur, une garantie effective pour récupérer ses avances du fait du droit de préférence dont bénéficie la banque.

Pénalités de retard

L’article 618-12 prévoit une pénalité de retard en cas de retard dans l’obtention du permis d’habiter ou du certificat de conformité, alors que le seul délai pour lequel le vendeur s’est engagé est le délai de livraison (Délai de remise des clés). A ce titre, la loi reste ambigüe par rapport à la date à partir de laquelle, les pénalités s’appliquent : Est-ce à partir du délai de livraison ou du délai d’obtention du permis d’habiter et/ou du certificat de conformité ?

En cas de difficultés du vendeur

La loi n’a prévu aucune garantie pour l’acquéreur dans les cas où le vendeur se trouve dans une situation de redressement ou de liquidation judiciaire. Par conséquent, lorsqu’un plan de redressement judiciaire est établi contre le vendeur, les acquéreurs sont inscrits sur la liste des créanciers, en attendant la fin de la procédure qui peut dépasser les 5 ans.

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Contact Mohamed Lazim, www.gui4.ma