Discours du Roi : l’ONU, l’Algérie, la Mauritanie, le Bahreïn, le Rwanda... se prononcent  

Discours du Roi : l’ONU, l’Algérie, la Mauritanie, le Bahreïn, le Rwanda... se prononcent  

Le discours du Roi Mohammed VI, à l'occasion du 43ème anniversaire de la Marche Verte, appelant la création d’un mécanisme pour l’ouverture d’un « dialogue franc et direct » avec l'Algérie a été diversement apprécié. Alger, le premier concerné par cet appel a jusqu’à présent pas réagit de manière très officielle. Toutefois, on observe un silence radio des médias officiels à part l’Agence de presse algérienne APS, qui a repris des parties du discours. Ailleurs un ancien ministre de la communication et certains médias privés se sont prononcés sur le discours du roi avec un ton de méfiance, certains le qualifiant même le discours de « rhétorique d'apaisement».

De son côté le Secrétaire général des Nations-Unies Antonio Guterres a réagit pas la voie de son porte-parole en déclarant « être partisan d'un dialogue renforcé entre le Maroc et l'Algérie ». La Mauritanie, le Bahreïn et Kigali ont tous aussi réagi au discours du Roi Mohamed VI.

Antonio Guterres réagit à la proposition du roi Mohammed VI

Le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres « a toujours été partisan d'un dialogue renforcé entre le Maroc et l'Algérie », a déclaré mercredi à New York son porte-parole, Stéphane Dujarric, en réaction à l'annonce par le roi Mohammed VI de la préparation du Royaume et dialogue franc avec l'Algérie, contenu dans le discours du souverain à la nation à l'occasion du 43e anniversaire de la marche verte.

« Le Secrétaire Général a toujours été favorable à un dialogue renforcé entre le Maroc et l'Algérie », a déclaré le porte-parole lors d'une conférence de presse, en réponse sur la proposition du Roi à l'Algérie de créer un mécanisme politique commun pour le dialogue et la consultation.

Dujarric a souligné que le Secrétaire général de l'ONU «se félicite du soutien de SM le Roi aux efforts déployés par l'Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara, Horst Kohler, en vue de la reprise des pourparlers».

Il a ajouté que António Guterres avait également salué les réactions positives à l'invitation de Kohler à la première table ronde, qui se tiendra à Genève les 5 et 6 décembre.

« Le Secrétaire général exprime l'espoir que cette première table ronde sera le début d'un processus qui conduira à une solution à ce conflit de longue date », a conclu Dujarric.

L'Algérie silencieuse, méfiante voire très pessimiste de la main tendue  

L'Algérie reste silencieuse sur l'invitation faite par le Marocain Mohammed VI, il y a quatre jours, à engager un « dialogue mutuel afin de résoudre les problèmes entre les deux parties ». D'autre part, la presse algérienne a qualifié cet appel de « manœuvre ». «Changement de ton» et «rhétorique d'apaisement».

Dans un discours prononcé mardi, le roi Mohammed VI a qualifié les relations entre les deux pays de « sortir de l'ordinaire et inacceptables », exprimant ainsi la volonté de son pays de se soumettre à un « dialogue direct et franc avec l'Algérie afin de surmonter les différences de situation et de fond qui entravent le développement des relations entre les deux pays voisins. »

Le roi a suggéré un mécanisme « qui pourrait constituer un cadre pratique pour la coopération sur diverses questions communes, notamment en ce qui concerne l'investissement des opportunités et des potentiels de développement dans la région du Maghreb ». Ce mécanisme « contribuera à renforcer la coordination mutuelle et la consultation pour défis internationaux, en particulier les stratégies de lutte contre le terrorisme et l'immigration. »

Les médias officiels algériens ont presque ignoré le discours du roi, tandis que les journaux privés sont revenus sur le sujet sous différents angles.

L'ancien ministre des Communications, Abdelaziz Rahabi, a exclu que les autorités algériennes réagissent à un tel message, qui est principalement « destiné à l'opinion publique nationale et internationale ». Rahabi a déclaré jeudi à A-Khabar : « Je crois que l'occasion au cours de laquelle ce discours a été prononcé les messages que le Maroc avait l'intention de transmettre à l'Algérie n'atteignaient pas un niveau acceptable. La situation aurait été différente si cette adresse avait été maintenue à l'occasion du Jour du Trône. »

Rahabi a ajouté que «le discours a été prononcé à la veille du début des négociations avec le Front Polisario sous les auspices des Nations Unies et de la présence de l'Algérie et de la Mauritanie en tant qu'observateurs. Je pense que transmettre le message lors de la Journée du trône aurait été un dénominateur explicite pour les bonnes intentions du Maroc sur la question du Sahara Occidental».

Dans le dernier numéro du journal franco-algérien Al-Watan , il était question: « S'agit-il de la dernière manœuvre du roi du Maroc? » Le journal s'interrogeait sur le fond d'un discours aussi inhabituel d’« apaisement », Mohamed VI a choisi de livrer son message sur les négociations à venir avec le Front Polisario à Genève. Le journal a demandé si le roi du Maroc envisageait de présenter l'Algérie comme la cause de la crise?

Le journal EShorouk a déclaré que « le Maroc n'a jamais appelé explicitement à surmonter les prétendues différences entre les deux pays, bien que l'Algérie nie l'existence d'un différend avec Rabat », affirmant que « quant au conflit du Sahara Occidental, l'Algérie ne se considérer comme faisant partie du conflit, mais plutôt en tant qu’observateur. De même, les Nations Unies ont clairement défini les parties au conflit, à savoir le Maroc et le Polisario ».

Le journal revient sur la déclaration « datant de deux ans » où , le Premier ministre Abdelmalek Sellal a déclaré, « au nom de l'Algérie, que son pays était prêt à ouvrir un dialogue approfondi avec le Maroc sur des problèmes controversés, mais que la question restait en suspens ». À ce moment-là, le journal EShorouk rapporte que Sellal a déclaré que «le Maroc est un pays voisin et apparenté. Nous avons mis fin aux divergences de points de vue, l'Algérie préférant...

adopter une approche globale dans laquelle les questions sont discutées dans un dialogue direct, d'autant plus qu'il s'agit d'une problématique spécifique. Notre pays reste tout à fait prêt à régler de telles questions sérieusement et pacifiquement. ». Il a ainsi souligné qu'une telle démarche est commode pour que « les deux pays puissent se consacrer mutuellement à la tâche suprême de construire l'Union du Maghreb Arabe (UMA) nos peuples aspirent à. »

Pour rappel, en 1994, l'Algérie a fermé sa frontière terrestre avec le Maroc après les accusations de Rabat concernant un attentat terroriste algérien contre les touristes espagnols à Marrakech et l'imposition de visas aux Algériens. En tant que telles, les autorités algériennes ont rejeté plusieurs appels antérieurs de leur homologue marocain à la réouverture de la frontière, mais à plusieurs conditions.

Dans une déclaration publiée par le ministère algérien des Affaires étrangères mi-2013, ces conditions étaient les suivantes: «Mettre fin à la campagne de diffamation menée par les milieux marocains officiels et non officiels contre l'Algérie, en coopérant sincèrement, efficacement et avec succès le flux de drogue et la contrebande venant du Maroc. Néanmoins, le Maroc est tenu de respecter la position du gouvernement algérien concernant la question du Sahara occidental, que l'Algérie considère comme une question de mettre fin au colonialisme et de travailler au règlement de l'ONU, par le droit international».

La Mauritanie se félicite de la proposition d'ouvrir le dialogue

La Mauritanie a salué la proposition faite par le Roi Mohammed VI, d'ouvrir un « dialogue franc et direct » avec l'Algérie.

«Nous accueillons favorablement toute initiative et nous lui souhaitons plein succès», a déclaré le ministre mauritanien de la Culture, de l'Artisanat et des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Sidi Mohamed Ould Maham, «la Mauritanie encourage et souhaite plein succès à toute initiative de nature à garantir la stabilité et la sécurité de la région, ainsi que le bon voisinage.», a ajouté M. Ould Maham.

Bahreïn soutient l’intégrité territoriale du Maroc

Le Royaume de Bahreïn salue l'initiative du monarque marocain concernant un mécanisme conjoint de dialogue avec l'Algérie

Dans un communiqué, le Royaume de Bahreïn « salue l'initiative présentée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI du Royaume frère du Maroc dans son discours prononcé à l'occasion du 43e anniversaire de la Marche verte pour la mise en place d'un mécanisme conjoint de dialogue et de consultation avec les Frères soeurs du Peuple, République algérienne démocratique. »

Le Royaume de Bahreïn espère que ce cadre consultatif basé sur le dialogue permettra aux deux pays de surmonter tous les obstacles qui entravent le développement de leurs relations et de les aider à investir leur potentiel pour soutenir les efforts de développement, renforcer les intérêts des pays du Maghreb arabe et contribuer à la force de l'action arabe commune.

Toutenant l’intégrité territoriale du Maroc, le Bahreïn « réaffirme sa position en faveur des droits légitimes du Royaume du Maroc sur ses régions méridionales, » conformément à l'initiative en faveur de l'autonomie et à la recherche d'une solution politique durable dans le cadre de la souveraineté du Royaume du Maroc et de ses ressortissants.

Kigali magnifie la proposition de Rabat

L’agence de presse officielle rwandaise IRN a lui aussi fait une lecture du discours du roi. Comme ailleurs, elle est revenue sur la proposition du Roi vis-à-vis de l’Algérie à propos de la création d’un mécanisme politique de dialogue et de consultation.

IRN détaille le mécanisme proposé par le Maroc qui est un cadre de dialogue franc et direct sans tabous afin de surmonter les divergences et de régler les problèmes actuels qui entravent le développement des relations entre les deux pays.

IRN estime que « la proposition de ce mécanisme du Roi Mohamed VI exprime une grande volonté et répond à un triple défi »: d’abord une histoire commune qui évoque la lutte contre le même colonisateur, ensuite un présent inquiétant caractérisé par la division et la discorde qui prévaut au Maghreb contrastant fortement avec ce qui unit les deux peuples et en fin un avenir commun qui appelle les responsables des deux pays à réfléchir à l'héritage à léguer aux générations futures et à les pousser à écouter les peuples et les jeunes de la région à propos de leurs aspirations et ambitions légitimes.

RFI, AFP et le musée de Paris

« C’est en tout cas un discours qui a toutes les apparences d’une main tendue, mais une main qui sera difficile à saisir du côté algérien », a déclaré RFI. « Parce que nous savons que le principal sujet de discorde reste le soutien d’Alger au Front Polisario qui revendique l’indépendance du Sahara. », a commenté le site français. RFI estime que dans son discours, le roi Mohammed VI a également tenu à réaffirmer le principe de l'intégrité territoriale du Royaume du Maroc, en parlant de « la province méridionale et du Sahara marocain. »

Toutefois RFI revient sur un fait qui marque la tension autour du Sahara. Citant l’AFP qui a reçu une déclaration du musée de Paris, RFI déclare qu’à Paris, le Centre Pompidou a dû suspendre la présentation d'un livre contenant des photos d'archives du conflit du Sahara Occidental, suite aux critiques des milieux culturels et des médias marocains. Le musée de Paris, regrettant « instrumentalisation .», a conclu RFI

Etats-Unis

Aux Etats-Unis, le site VOP, (les Nouvelles d’aujourd’hui) déclare que le Roi Mohammed VI a envoyé un message surprise en Algérie où le roi a appelé les autorités algériennes à mettre en place un mécanisme visant à normaliser les relations maroco-algériennes.

VOP est revenu sur la citation du Roi paraphrasant le Prophète, disant « Jibril encore m'a recommandé au voisin, donc je pensais qu'il hériterait, » indiquant qu'il tend la main aux frères en Algérie à travailler ensemble pour surmonter les différences bilatérales.

Mouhamet Ndiongue

 

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