Une autre Femen expulsée du Maroc, les deux autres donnent leur version des faits

Une autre Femen expulsée du Maroc, les deux autres donnent leur version des faits

Mardi 2 juin, deux Femen françaises ont procédé à leur action sur l’esplanade de la Tour Hassan à Rabat, torse nu, poing levé, et s’embrassant devant des journalistes qui les accompagnaient. Le soir, comme on sait, elles ont été expulsées du Maroc. Mercredi 3 juin, c’était au tour d’une autre militante, espagnole cette fois, d’être expulsée du Maroc. Mais son cas est différent. Quant aux deux Françaises, elles ont donné leur version des faits aux médias, à leur retour à Paris. Explications.

Alors que la leader du mouvement féministe FEMEN France, Inna Shevchenko, expliquait qu’une de leurs militantes espagnole avait été enlevée au Maroc, le ministère de l’Intérieur vient de donner sa version sur cette dame. Dans un communiqué, le ministère précise qu’ « une ressortissante espagnole, qui avait accédé mardi au territoire national pour parrainer des actions non autorisées dans le cadre d’offensives menées par des organisations étrangères soutenant des causes de déviation des mœurs, a fait l’objet mercredi d’une nouvelle mesure d’expulsion », une précédente expulsion ayant déjà été décidée contre cette personne le 22 mai dernier. « La ressortissante espagnole est revenue au Maroc avec un nouveau passeport portant une identité différente, alors que le premier passeport était valide jusqu’en 2019 », ajoute le communiqué.

Ce sont peut-être des Femen qui agissent pour ce qu’elles estiment être bon, mais le fait qu’un individu puisse obtenir, en Espagne, deux passeports avec deux identités différentes pose un problème de sécurité en ces temps troubles.

Le gouvernement a alors réagi… le ministre de l’Intérieur Mohammed Hassad a pris contact avec son homologue espagnol pour en obtenir des explications, de même que le conseiller politique de l’ambassade d’Espagne a été convoqué au ministère des Affaires étrangères.

On notera l’intelligence de la réaction de la police contre les deux Femen françaises, habituées à être bousculées et malmenées au Canada, en Russie et jusqu’à Paris… elles ont été interceptées par la police, qu’elles avaient cherché à provoquer en allant sur l’esplanade d’un édifice religieux, interrogées, « bien traitées » selon leur témoignage délivré une fois arrivées en France, et expulsées.

Pour ce qui est de l’Espagnole, elle aurait pu être inquiétée pour sa double identité, du moins jusqu’à recevoir une réponse officielle espagnole. Elle a été arrêtée, interrogée, puis libérée, avant d’être expulsée à son tour.

Les Femen parlent

Quant aux deux Françaises, elles ont...

accordé un long entretien aux Inrocks, une fois revenues en France. Extraits.

« Nous suivons de près l’actualité internationale. La semaine dernière, trois homosexuels ont été condamnés à trois ans de prison à cause de leur orientation sexuelle *. On a décidé d’aller directement sur place, pour faire passer un message de soutien au peuple marocain et aux homosexuels à travers le monde ». C’est gentil pour le peuple marocain…

« Lara est arrivée d’Espagne. Mais elle a été enlevée par les policiers et placée sous surveillance avant l’action. Nous avons donc décidé d’envoyer une autre activiste à sa place ». (Voir témoignage de ladite Lara plus bas).

« Chacune d’entre nous s’est retrouvée entourée de 5 à 10 hommes. Nous avons eu droit à une série de questions répétées une dizaine de fois. Cela pouvait porter sur des sujets très personnels, sur notre famille, nos amis. Mais ce qui revenait surtout, c’était leurs questions pour savoir si on connaissait des Marocains, militants ou journalistes. Ils voulaient des noms, qu’on ne leur a évidemment pas donnés. On nous a aussi demandé quel était le but de notre action, donc on a abordé la question de l’homosexualité (…). On m’a demandé si j’étais “normale ou lesbienne” puis expliqué que l’homosexualité était une maladie. Et c’est justement ça qui est ahurissant : c’est d’admettre qu’en 2015 on soit dans un pays où les représentants de l’Etat puissent penser ça ».

« On a été extrêmement bien traitées. On a eu le droit d’avoir des cigarettes, d’avoir à boire, à manger ou d’aller aux toilettes. Si c’étaient des Marocaines qui avaient mené cette action ça n’aurait sûrement pas été le cas.  Maintenant, on s’inquiète aussi pour la liberté des journalistes qui ont eu le courage de relayer notre action… ». Ne vous inquiétez pas trop, Mesdames, tout va bien…

Quant à l’Espagnole Lara, voilà ce qu’elle a dit : « Dimanche, deux hommes sont venus à l’appartement et ont demandé mon passeport. Ils m’ont signifié que je devais respecter la loi dans le pays (…).  Ils voulaient savoir pourquoi j’étais là. Ils m’ont menacé de prendre mon passeport. Puis ils ont pris mon téléphone et ont fouillé dans mes messages (…). Ce qui m’est arrivé montre bien ce qu’il arrive aux militants dans ce pays. Les activistes sont persécutés ». Comme  persécution, il y a pire…

 

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