Un juge espagnol veut poursuivre 11 responsables marocains pour génocide

Un juge espagnol veut poursuivre 11 responsables marocains pour génocide

Il s’appelle Pablo Ruz, il a 39 ans, il travaille à l’Audience nationale, une haute cour espagnole, et il souhaite renvoyer  devant un tribunal onze fonctionnaires, policiers et militaires, marocains pour des faits de « génocide » entre 1975 et 1991 au Sahara occidental. Le juge Ruz estime ainsi que les fonctionnaires marocains peuvent être jugés, dans un arrêt notifiant la fin de son enquête et qui peut encore faire l'objet d'un recours.

Le juge par ailleurs a lancé un mandat d'arrêt pour sept suspects déjà mis en examen et il a aussi délivré quatre commissions rogatoires pour quatre autres personnes, afin que les poursuites leurs soient notifiées, car elles n'étaient pas visées jusque-là.

L'enquête avait été ouverte par le juge Baltasar Garzon en octobre 2007, après le dépôt d'une plainte par des associations de défense des droits de l'Homme et des familles de victimes faisant état de la disparition de plus de 500 Sahraouis à partir de 1975. On rappelle que le juge Garzon a été très sévèrement remis à l’ordre suite à son enquête sur les années franquistes en Espagne et les très nombreuses atteintes aux droits de l’Homme.

Le juge Pablo Ruz affirme donc dans ses conclusions que « la population civile sahraouie a été systématiquement attaquée par la police et l'armée marocaines entre 1975 et 1991 lors du conflit ayant opposé le royaume chérifien...

au Front Polisario, luttant contre ‘l'occupation’ du Sahara ».

Qui sont ces responsables ? Deux sont très connus, l’ancien ministre de l’Intérieur, mort depuis, Driss Basri et l’ancien directeur de la Sûreté nationale Hafed Benhachem. D’autres noms, moins célèbres, sont cités, et parmi eux, des officiers de police, de la gendarmerie et de l’armée, en plus de deux hauts responsables de l’administration territoriale.

Les faits remontent à plus de 35 ans et sont en principe aussi imprescriptibles que le juge semble irascible. Bien que les médias aient établi un parallèle entre « l’affaire  Hammouchi » avec la France en 2014 et celle-ci avec l’Espagne, il semble peu probable que cela nuise aux relations entre Rabat et Madrid, mais il est difficile de ne pas faire un parallèle entre l’annonce de cette décision de Pablo Ruz et l’ouverture des débats à l’ONU sur l’affaire du Sahara. C’est en effet devenu quasi « rituel »… ce type d’affaires sort en général en avril de chaque année.

Selon Alyaoum24 qui le cite, Hafed Benhachem aurait déclaré en réaction que le juge Ruz est « un des mercenaires du Polisario », qu’il « ment » et que « cela fait des années qu’il profère de pareilles accusations ». Si cela se confirme, cette sortie serait malheureuse de la part d’un homme parti en retraite, et qui serait bien inspiré de le rester, pour laisser la justice et la diplomatie faire leur travail…

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