Pénurie d'eau: Le PCNS expose les défis et les réponses

Pénurie d'eau: Le PCNS expose les défis et les réponses

Le Policy Center for the New South a organisé lundi 12 avril un webinaire sur le thème « Rareté des ressources en eau : Un même défi, mais des réponses différentes ». La modératrice de l’événement, Fatima Ezzahra Mengoub, agroéconomiste au Policy Center, a ouvert la session en présentant le thème et les invités de marque du panel.

La première intervenante, l’ambassadrice Josefa Leonel Correia Sacko, agronome africaine de renom et Commissaire chargée de l’Agriculture, du développement rural, de l’économie bleue et de l’environnement durable de la Commission de l’Union africaine, a dans un premier temps souligné l’importance de l’eau en tant qu’élément vital pour notre survie et nos écosystèmes et en tant qu’intrant essentiel dans la plupart des secteurs que l’Afrique développe pour atteindre les objectifs de l’Agenda 2063. Sacko a poursuivi en dressant un bilan des ressources en eau sur le continent et en analysant la variabilité du climat qui exacerbe la rareté de la ressource. Par ailleurs, elle a expliqué que le manque d’eau en Afrique est également aggravé par l’insuffisance des infrastructures, les investissements limités dans le secteur et le fait que cette question ne constitue pas une priorité dans la plupart des pays. Pour finir, l’agronome a appelé les dirigeants politiques et les nouvelles générations à s’engager en faveur d’une utilisation et d’une gestion équitables et durables des ressources en eau grâce à une coopération efficace et aux technologies modernes.

Dans son intervention, Mohamed Ait Kadi, Président du Conseil général du développement agricole, a souligné que le défi de l’eau est porteur de nombreuses incertitudes et que le changement climatique constitue un multiplicateur de menaces. Il a présenté les incidences estimées de cette question urgente sur les perspectives économiques de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), en soulignant l’importance d’une approche holistique du secteur de l’eau qui soit durable sur le plan économique, social et environnemental.

Au-delà de cette approche, Ait Kadi a expliqué comment le commerce international pouvait être un élément majeur dans la gestion de la répartition géographique inégale de l’eau et la réalisation de la sécurité hydrique et alimentaire pour tous. En prenant le cas du Maroc comme exemple intéressant de politiques de gestion de l’eau, principalement dans le secteur agricole, le professeur Ait Kadi a soulevé un certain nombre de questions stratégiques ‘il a ensuite conceptualisées dans un diagramme illustrant le lien entre l’eau, l’agriculture et le commerce. En conclusion, Ait Kadi a souligné l’importance de procéder à une estimation correcte du défi multidimensionnel que représente aujourd’hui la rareté de l’eau et de prendre en compte la corrélation entre ces dimensions, comme étape cruciale d’une conception et d’une mise en œuvre efficaces des politiques.

L’intervenant suivant, Alexandru Cosmin Buteica, spécialiste de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement auprès de la Banque mondiale, a aiguillé la discussion sur les différentes possibilités d’aborder la question de la pénurie d’eau dans les années à venir. Il s’est rallié aux points de vue précédemment exprimés sur la question, lesquels font ressortir que l’eau est un vecteur reliant toutes les industries, faisant de la gestion intégrée des ressources en eau la clé de la sécurité hydrique. Ensuite, il a présenté les grandes lignes d’un ensemble de solutions à envisager dans ce contexte, notamment la promotion d’une nouvelle perspective pour les eaux usées qui représentent une opportunité susceptible d’aider à mieux répondre à la question de la sécurité hydrique dans la région, car elles contiennent des ressources...

précieuses et sont potentiellement sources d’énergie. Une autre solution potentielle évoquée par Cosmin Buteica est liée au stockage de l’eau grâce à la réalisation de projets d’infrastructures vertes qui contribuent à la réalisation des objectifs de développement, notamment la sécurité hydrique, Pour Guy Jobbins, directeur d'Astande, la promesse des technologies pour faire face aux défis croissants de l'insécurité hydrique dans le monde, mais aussi et surtout dans la région MENA, est limitée par deux questions : la première est liée à la nature des technologies, où elles sont appliquées et aux types de technologies disponibles ; la seconde concerne le rôle de l'eau dans la prise de décision politique, dans une perspective d'économie politique. S’agissant de sa deuxième question, Guy Jobbins a fait état de la contradiction entre l’impact tangible de la pénurie d’eau sur la croissance économique et la stabilité sociale et sa non-prise en compte dans l’agenda de l’élaboration des politiques. En revenant sur la première question soulevée, il a précisé que malgré les différents avantages et gains d’efficacité que semblent offrir les technologies, elles ne permettent pas de réaffecter l’eau et ne peuvent pas en réduire les niveaux de consommation. En fait, les technologies peuvent potentiellement augmenter la masse d’eau, mais elles restent tributaires de politiques de gestion de l’eau inclusives pour arriver à des résultats plus durables. En d’autres termes, les technologies doivent être accompagnées d’options techniques, institutionnelles et politiques qui permettent leur utilisation optimale pour résoudre le problème de la rareté des ressources en eau.

Pour sa part, Rabi Mohtar, Senior Fellow au Policy Center for the New South, a axé son intervention sur la nécessité de ne pas accuser le secteur agricole de stocker toutes les ressources, dans la mesure où il est le fondement de l’économie, de la stabilité sociale et de la résilience en matière de sécurité alimentaire. Il a expliqué que l’élaboration d’un plan de gestion de l’eau pour la région devait faire l’objet d’une discussion, d’une délibération et d’une convergence avec de multiples secteurs qui dépassent largement le cadre de l’eau, comme l’industrie, l’énergie et les autres secteurs qui bénéficient également des ressources en eau. Mohtar a ensuite souligné l’importance de l’eau pour les sols nourriciers, appelant à la nécessité de reconnaître que des sols sains sont essentiels à cette relation entre l’eau et la nourriture et qu’il en est rarement fait état dans les délibérations des experts en eau. En fait, le sol assure la sécurité alimentaire, la résilience des communautés de la région et la stabilité des flux de migration forcée. Une autre approche importante soulevée par l’intervenant est le lien entre la science et la pratique de nos jours ; il s’est rangé à l’avis de l’intervenant précédent qui a reconnu que quels que soient les progrès technologiques et la disponibilité de solutions scientifiques innovantes, d’autres questions doivent être réexaminées, comme la mesure du degré de l’eau, les niveaux et les habitudes de consommation d’eau, le transport et la compatibilité des eaux réutilisées avec les sols agricoles.

À cet égard, Rabi Mohtar a cité des exemples et des études de cas de la région, qui mettent en évidence les effets considérables de l’utilisation d’eaux usées traitées dans l’agriculture, souvent négligés dans les discussions scientifiques et politiques sur la rareté des ressources en eau. En conclusion, Mohtar a insisté sur l’importance de fournir des données scientifiques appropriées aux décideurs afin de leur permettre d’élaborer des politiques plus efficaces dans ce domaine.