(Billet 459) – Il faut sauver le soldat Elotmani !

(Billet 459) – Il faut sauver le soldat Elotmani !

Il est le chef du parti qui fut, et est encore, le plus virulent contre toute idée de « normalisation » avec Israël et lui, Saâddedine Elotmani, l’a dit dans un lointain passé et encore à un passé récent. Il n’aime pas cette idée de normaliser, ou même établir des liaisons aériennes, avec l’Etat hébreu. C’est son droit, en tant qu’homme politique, mais en sa qualité de chef du gouvernement, il a mis en priorité l’intérêt supérieur de l’Etat. Et il a signé, sachant que le deal avec Israël ne forme pas nécessairement une idylle.

Et, pour appeler les choses par leur nom, l’Histoire retiendra que c’est le chef d’un parti islamiste qui a signé la normalisation avec Israël ! Mais elle retiendra aussi que c’est le chef d’un parti islamiste qui a signé au nom du Maroc, dont la diplomatie sort renforcée, la position géostratégique régionale et continentale affirmée et l’intégrité territoriale affermie. A partir de là, il faut s’inquiéter du sort de Saâdeddine Elotmani, sérieusement secoué.

Moqué par les plus gentils, critiqué par les militants de la cause palestinienne et violemment attaqué par de larges franges de la société et surtout de son parti, le chef du gouvernement n’en mène pas large aujourd’hui. Ses propres alliés chefs de partis n’ont apporté qu’un soutien du bout des lèvres à la reprise des relations maroco-israéliennes. Et c’est là que son ancien ami et actuel adversaire Abdelilah Benkirane sort du bois, pour venir à sa rescousse…

Certains liront cette sortie de l’ancien chef du PJD et du gouvernement comme une subltile manœuvre qui, sous couvert de patriotisme et de sens des responsabilités, préparerait à son retour attendu par les masses… Il semblerait que...

non. M. Benkirane a parlé en homme d’Etat, responsable, et qu’on l’apprécie ou pas, cette attitude est tout à son honneur. Il a affirmé sa peine face à cette normalisation, mais il a martelé encore et encore qu’il s’agit d’une affaire nationale et que l’unité des rangs est aujourd’hui la règle.

Pour ceux qui moquent M. Elotmani, qu’ils se demandent ce qu’il aurait pu faire… Dire non et démissionner ? Infliger une telle humiliation au roi et déconvenue au Maroc, pour se faire plaisir et soigner son image ? Il a préféré, à son corps défendant, avaler la couleuvre et ses petits, puis une autre, et signer à la même table que le chef du Conseil national de sécurité israélien ! Et c’est tout à son honneur aussi.

Depuis une semaine, M. Elotmani est accablé par la presse nationale pour avoir évoqué le sort des enclaves de Sebta et Melilla… qui n’a pas plu aux Espagnols, lesquels ont convoqué l’ambassadrice du Maroc à Madrid pour lui tirer les oreilles. Nous devons défendre notre chef du gouvernement, parce que c’est notre chef du gouvernement et qu’il s’est exprimé en défense aux droits du Maroc sur son territoire !

Et redisons-le… Face à l’effroyable couardise et la très condamnable pusillanimité de notre classe politique, toute notre classe politique, sans exception, Saadeddine Elotmani a tenu bon, pris des coups, assumé une remise en question de ses plus profondes convictions, et assuré ses fonctions. L’heure est à l’unité nationale. Il faut sauver le soldat Elotmani… Abdelilah Benkirane a commencé. Le moins que nous puissions faire est d’épargner le chef du gouvernement et de comprendre et d’analyser cette nouvelle donne qui est celle du Maroc depuis deux semaines.

Aziz Boucetta