(Billet 88) – Une fiscalité enfin bien Assise ? Espérons…

(Billet 88) – Une fiscalité enfin bien Assise ? Espérons…

Au risque de sombrer dans le monologue, le Maroc dialogue… La semaine dernière, nous avons eu droit de la part de notre gouvernement au dialogue commercial à Marrakech, puis au dialogue social à Rabat et, aujourd’hui, au dialogue fiscal à Skhirat. Les gens ont accouru, palabré, beaucoup ri, pris leurs grands airs et dit vouloir prendre aussi de grandes décisions. Fort bien, mais il faut les prendre cette fois, et surtout que les gens perçoivent dur que ces décisions ont bien été prises, et que fiscalité ne rime plus avec calamité.

Aux Assises de la fiscalité, donc, ils sont venus, ils étaient tous là, dès qu’ils ont entendu ce cri, elle va être réformée, la fiscalité… Et bien, il était temps car si le principe fondamental de l’impôt est le consentement, entre évasion, fraude, niches et autres (volontés) de bakchich, on peut en douter, de ce consentement citoyen à la fiscalité. D’où cette démangeaison qui titille depuis longtemps...

Pour les jeunes, pour le commerce, pour l’agriculture, pour l’éducation, pour la santé… le chef de l’Etat n’a cessé de tirer la sonnette d’alarme, puis les oreilles, et même des larmes ; il a appelé à plus d’équité et d’efficacité, à moins de légèreté et de cupidité. Las… Et voilà que tous les intervenants aux Assises bien solides, dans leurs bafouilles, n’ont cessé de faire référence à « Sa Majesté, que...

Dieu l’assiste… ». Très bien, alors assistez-le, vous aussi, « ô ministres intègres ! Voilà votre façon de servir, serviteurs qui fuyez la raison ! », comme aurait pu dire Hugo….

Le film institutionnel projeté lors de cette charmante agape de Skhirate rappelle que « le monde change, le Maroc aussi ». Certes, mais le monde, en changeant, bout aussi… est-ce cela que nous voulons pour ce pays ? Non. Si alors, comme le rappelle Mohamed Benchaâboun, le tiers des entreprises soumises à l’IS sont déficitaires, 84 entreprises paient 50% de l’IS, un IR épouvantable, c’est qu’il existe un problème de confiance, et c’est au gouvernement de restaurer, voire instaurer, cette confiance, pas à la DGI !

Le patron du fisc Omar Faraj, paradoxalement apparu comme le plus humain des intervenants, en est bien conscient, lui qui, sortant même de son rôle de pourvoyeur de fonds à l’Etat, a parlé simplicité des règles, perception positive de l’impôt et surtout confiance des contribuables. Il se chargerait alors de traduire la politique fiscale en des tonnes de dirhams, sans trop de drames, et avec grandeur d’âme.

Or, dans politique fiscale, il y a politique… Saadeddine Elotmani et ses hommes réussiront-ils donc en 2019 là où Abdelilah Benkirane et les siens (souvent les mêmes) ont échoué en 2013 ? Nos élites feront-elles encore pshiiit ? Réponse dans quelques jours, ou semaines, ou mois… à l’intensité de la tension sociale.

Aziz Boucetta