(Billet 81) – Suicidez-vous !

(Billet 81) – Suicidez-vous !

Une société bien tenue, fonctionnant bien, est formée d’une population qui vit dans l’ordre et la stabilité, un Etat qui réglemente et cadre cet ordre public, et une communauté de services qui veille à son respect. Idéalement, l’harmonie règne entre ces trois éléments, malgré les heurts et les incompréhensions, de menus malheurs et d’incessantes concertations, voire parfois compromissions.

Dans les contrées où cela va mal, l’harmonie recule et, progressivement, tour à tour, s’installe la méfiance, puis le rejet, et enfin la haine, elle-même due à la peur. Deux éléments se liguent alors contre le troisième. Et quand un Etat atteint ce point, il lui devient important, et même urgent, de se remettre en question et de trouver le juste équilibre. Dans notre monde actuel, l’éternelle équation sécurité/liberté est toujours posée face à des dangers externes mutants et des radicalismes internes (pas toujours religieux) croissants. Les Etats magouillent, les médias verrouillent et les réseaux gargouillent, dans un climat délétère.

Le meilleur exemple de la distorsion des équilibres entre les trois éléments Etat-population-police est apporté par la France d’aujourd’hui où la population, énervée, conteste, proteste et manifeste. L’Etat, de plus en plus permissif, s’appuie sur sa police de plus en plus répressive, et dépressive, qui le prend en quelque sorte en otage, obtenant de lui tout et même le reste, face à la haine ambiante. Les suicides, donc, se multiplient...

et des manifestants ont même hurlé à la face des policiers : « Suicidez-vous ! », et autres propos de corps de garde, suscitant une juste indignation. En Algérie, le symptôme est le même, même si sa manifestation est différente car plus complexe.

C’est en regardant alentour que nous prenons la mesure de l’importance de la stabilité régnant dans le royaume, en dépit des blocs de contestation qui ne manquent pas, sectoriels, culturels, sociaux et politiques. La police et les services, jadis honnis car effrayants, sont partie intégrante de la population, dans un équilibre des trois éléments Etat-population-services. Les abus existent toujours et les excès sévissent encore, mais globalement, et en dépit des remontrances des ONG de défense des droits, le calme règne dans un meilleur respect des règles, toutes choses étant bien évidemment perfectibles par ailleurs.

Au Maroc, la population connaît de multiples problèmes mais l’Etat n’use pas de violence pour la traiter, malgré les charges sur la politique sécuritaire, et il n’existe pas de haine ou de rejet de la police par les gens ; il y a une différence entre manifestations musclées et manifestants haineux. Bien malheureusement, il existera toujours des gens qui contesteront cette réalité, à la recherche d’une improbable perfection et d’inavouables objectifs, et dans une remise en cause systématique, de tout et de tous, qui ne faiblit pas. C’est au mieux dommage, au pire dangereux.

Aziz Boucetta