(Billet 46) - Pour les gamins des rues, pas d’école, mais beaucoup de colle !

(Billet 46) - Pour les gamins des rues, pas d’école, mais beaucoup de colle !

On les voit déambuler, la démarche peu assurée, les yeux hagards, vaguement inquiétants mais en réalité inquiets, vêtus de guenilles… ils vous jettent un regard vide et vous projettent à la figure toute la détresse du monde, une détresse à hurler puis, peut-être, pleurer. Enfants des rues, ils ont 10, 12, 15 ans, ils sont garçons ou filles, et ils interpellent notre conscience, aussi innocente individuellement que responsable collectivement.

D’où viennent-ils ? Qui fuyant un domicile où la violence règne, qui renvoyés de la maison par des parents indignes… qui tombés droit d’un utérus, plongeant dans la brutalité d’un monde qu’ils n’ont pas demandé à connaître. Dernièrement, le chef du parquet national Mohamed Abdennabaoui a adressé un courrier à « ses » procureurs, leur enjoignant de reconsidérer la situation, le statut et le traitement de ces gamins. C’est bien le moins, et ce n’est pas trop tôt, de la part d’un Etat qui les ignore et d’une société qui les juge, les privant d’école, les laissant livrés à la colle.

Pas de grandes statistiques ni même de petites projections… seulement une sinistre comptabilité sociale : 25.000 enfants en 2018 dans les rues de Tanger et de Casablanca, estime-t-on… mais voici quelques années, le Pr Chafik Chraïbi avait avancé le chiffre de 600 avortements clandestins au Maroc. Et que pensez-vous qu’il arriva ? C’est le...

médecin, et non l’abcès, qu’on creva !... Il y a néanmoins survécu, mais aujourd’hui, des dizaines de milliers d’enfants perdus survivent dans nos rues, n’attendant rien de bien de la société qui ne peut en retour en attendre que du mal. Il y en a tellement chez nous qu’ils ont même débordé en Espagne et en France…

Que faire ? L’Etat devrait d’abord décréter, même discrètement, une urgence nationale, puis aussi décider d’arrêter le fléau, de l’étouffer à la base. Et la base, en grande partie, ce sont les enfants dits illégitimes car leurs parents n‘ont pas pensé à coucher sur papier adoulaire leur relation avant de coucher tout court, et d’enfanter. Il faut abolir cet ahurissant, et tout à fait idiot, article 490 qui interdit les relations sexuelles hors des liens tellement sacrés du mariage. Une épousaille pour un coït ? Lol, ricaneraient nos jeunes…

Mais l’acte d’amour engendre souvent le malheur d’un enfant, éventuellement de ses parents, certainement de la société. Il faut dépénaliser les relations hors mariage pour pouvoir donner un statut aux enfants qui en résultent, et il est important de sensibiliser, encore plus, sur la contraception préventive et la contraception d’urgence (pilule du lendemain). Dans l’intervalle, une armée de laissés pour compte, qui demanderont un jour des comptes, grossit dangereusement de jour en jour.

Aziz Boucetta