Avec les atermoiements de la classe politique, la loi de finances ne serait promulguée qu’en mars 2017

Avec les atermoiements de la classe politique, la loi de finances ne serait promulguée qu’en mars 2017

Cela fait 5 semaines que les élections sont passées, que le PJD a triomphé, puis que son chef Abdelilah Benkirane  désigné par le roi Mohammed VI pour former sa majorité et son gouvernement, piétine. Le Maroc est en pleine vacance des institutions, exécutive et législative, et cela rejaillit sur la bonne marche du pays, avec une loi de Finances, déposée dans les temps, mais qui ne sera pas, plus, adoptée dans les temps, c’est-à-dire avant le 31 décembre.

En effet, à supposer qu’avec l’accord de l’USFP, du RNI, ou de n’importe quelle autre formation qui complèterait la majorité du PJD, les discussions sur les affectations des départements et les noms des ministrables commencent cette semaine, il faudra encore au moins une semaine à dix jours avant que le roi Mohammed VI ne désigne le gouvernement. En étant optimiste.

Or, en parallèle à cela, la Chambre des représentants doit également constituer ses groupes et son Bureau, après l’élection de son président. Ce sont donc deux négociations simultanées qui se dérouleront entre composantes de la nouvelle majorité, chacun essayant de tirer le maximum à son avantage.

Si, puisque les choses s’accélèrent, une majorité se dessine cette semaine, il faudra aussi tenir compte du calendrier du chef de l’Etat, qui doit entamer dès le début de la semaine du lundi 21 novembre une visite en Afrique de l’Est, commençant par l’Ethiopie et se poursuivant à Madagascar. Cela nous ramène à début décembre. Si le roi désigne le gouvernement la première semaine de décembre, en supposant que le parlement aura désigné président, Bureau et commissions permanentes, on passera à l’étape constitutionnelle  suivante.

Il faudra alors attendre l’élaboration de la déclaration de politique générale du chef du gouvernement, qu’il devra présenter au parlement. On peut compter une quinzaine de jours pour négocier et mettre en place le programme du gouvernement, ce qui nous place aux alentours du 20 décembre. Puis arrivera la présentation du...

vote de cette déclaration, pour adoption par les représentants et débat chez les conseillers. Mais puisque la majorité sera constituée, osons un délai d’une semaine. Nous serons alors fin décembre, début janvier.

Commencera alors la présentation et la discussion du projet de loi de Finances, avec ses commissions, ses discussions, ses dissensions, alors même que nous aurons une majorité qui vient de se constituer, peut-être des ministres qui n’auront pas eu le temps de prendre connaissance du PLF et tout ce monde devra apprendre à travailler en commun. La procédure est très lourde, avec des budgets sectoriels, des débats, des votes, et la navette entre les deux Chambres. Cela nécessitera environ deux mois, et nous serons déjà bien entrés en 2017, vers fin février, voire début mars…

Cela conduira donc le Maroc à fonctionner avec la règle des douzièmes pour les trois premiers de 2017. Le douzième étant un décret du chef du gouvernement pour débloquer les dépenses de fonctionnement de chaque mois en fonction de la loi de finances passée… « En effet, il faut savoir que le calendrier est incompressible, quel que soit le volontarisme politique », souligne le politologue chevronné Mustapha Sehimi.

Ce dernier ajoute que « ce ne sera pas la 1ère fois où cela se produirait car pour le gouvernement Benkirane, déjà, en 2012, le PLF avait été adopté le 18 octobre 2011 par le gouvernement el Fassi. Le cabinet Benkirane avait été nommé le 3 janvier 2012 mais n’avait été investi que le 29 janvier, et la loi de finances n’avait été publiée au Bulletin Officiel que le 10 mai 2012 »…

On peut s’attendre à ce que cette année, elle le soit aux débuts du mois de mars, ce qui ôte encore toute visibilité aux opérateurs économiques. Après une année 2016 caractérisée par une forme d’attentisme dû aux élections et à leur incertitude, nous aurons une année 2017 qui commencera également d’une manière bancale.

Aziz Boucetta

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