Au Maroc, on frappe toujours, et même plus, les femmes
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- 02 août 2016 --
- Maroc
L’Observatoire national de lutte contre la violence à l’égard des femmes a établi une synthèse des chiffres, rapports et statistiques gouvernementales et des services de police et de gendarmerie sur les violences à l’égard des femmes, tant physiques qu’économiques. Il en a fait son rapport annuel, présenté en fin de semaine dernière. Il en ressort que deux femmes sur trois ont été violentées en 2014 ! Ce constat intervient alors que la loi sur la violence contre les femmes est en passe d’être adoptée par le parlement.
Globalement, pour l’année 2014 qui a été examinée par l’Observatoire, les femmes victimes de violences sont âgées de 18 à 45 ans, sont citadines (75% des cas) et ne travaillent pas (53,8 %, contre 54,4% en 2013). Les employées de maison représentent 12,4% (9,8% en 2013) du total des femmes victimes de violence. Le ministère de la Justice et des Libertés apporte cette donnée que la violence physique à l’égard des femmes a augmenté de 54,8% à 63,3% entre 2013 et 2014.
En effet, au niveau des cas jugés par les tribunaux du royaume, 47,7% des femmes violentées ont eu une invalidité de moins de 20 jours, 14,8% de ces cas ont causé une invalidité de plus de 20 jours, et 37,5% représentent les autres cas de violence, qui sont commises à 88% par des hommes et le reste par des femmes (essentiellement contre leurs employées de maison). De plus, entre 2013 et 2014, le nombre d’homicides volontaires où le mari tue son épouse a connu une hausse de 10%, soit 55 cas.
Les services de police apportent d’autres indications. En 2013, les services de police...
ont enregistré 15.640 plaintes, et ce chiffre a augmenté à 15.865 en 2014. Dans le détail, 90% de ces affaires relèvent de violences physiques, les femmes mariées représentant plus du double des célibataires victimes de violences. La police note également que 9% de ces actes de violence se rapportent à des agressions sexuelles, et près des deux tiers ont visé des femmes de moins de 30 ans, 31% contre des femmes de 31 à 45 ans, et 7,5% des femmes de plus de 45 ans.
En ce qui concerne les endroits où sont commises ces violences, l’Observatoire relève qu’en 2014, 54% des cas ont été enregistrés dans des espaces publics contre 39% dans les maisons, et 5% au travail. A elles seules, les villes de Casablanca, Rabat, Kenitra, Fès et Agadir représentent plus de 70% des cas de violence.
Enfin, les violences économiques représentent 27% du total, contre 15% en 2012.
Il faut savoir que ces chiffres sont très en-deçà de la réalité, et pour plusieurs raisons. De très nombreuses femmes ne rapportent pas les violences dont elles sont victimes car elles trouvent cela « normal », tandis que d’autres ne peuvent porter plainte en raison de considérations familiales et sociales, en plus de la pudeur et de la honte à se déclarer violée ou violentée par son époux. De plus, les services de police n’enregistrent pas toujours les cas qui leur sont rapportés, soit parce que, - comme l’avait indiqué le CNDH dans son rapport d’octobre 2015, les policiers nourrissent une forme d’empathie avec les maris, soit parce que les plaintes interviennent trop tard et que les traces ne sont plus visibles.
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