Maroc et médias français : pas si simple !

Maroc et médias français : pas si simple !

Le samedi 10 octobre 2015, l’Association Maroc Devoirs & Droits (MDD), basée à Paris, a organisé une conférence-débat sur la manière dont les médias français informent leurs concitoyens sur l’évolution du Maroc. En organisant ce débat, Maroc Devoirs & Droits souhaitait confronter les points de vue des journalistes français et marocains à partir d’un questionnement factuel, précis et sans concessions.

Dans son allocution d’accueil le président de MDD, Karim Britel, a souligné l’importance des changements et des évolutions profondes que connait le Maroc depuis l’accession au trône de Mohammed VI. Il a cité nombre de domaines dans lesquels le Maroc est avant-gardiste. Il a insisté sur le fait que cette rencontre avait pour but de comprendre pourquoi les médias français semblent avoir figé dans le passé leur vision du Maroc.’

Le débat a été lancé et animé par le secrétaire général de MDD, Khalid Hamdani, qui a rappelé que les relations entre le Maroc et la France sont anciennes, profondes et complexes. Pour ce qui est de l’essentiel ces relations sont solides, mais il arrive que des nuages traversent le ciel qui unit Rabat et Paris. L’écho médiatique de ces relations ne rend pas toujours compte de leur complexité. Trop souvent les clichés et les idées toutes faites l’emportent sur les réalités.

A cette occasion, l’association MDD a invité du côté français Nadia Bey, journaliste à Radio Orient, et Abderrahim Hafidi, journaliste à France Télévision, et, du côté marocain, Aziz Boucetta directeur de PanoraPost. Ce sont essentiellement les deux points suivants qui ont été analysés :

1/ Les réalisations et les succès du Maroc sont peu soulignés par les médias français et, lorsqu’ils le sont, relativisés immédiatement par les aspects négatifs ;

2/ Dans un monde globalisé, le Maroc et les Marocains ont changé leur regard sur la France, et il ne semble pas que la France ait fait de même.

Nadia Bey a rappelé que les médias s’intéressent davantage aux « trains qui arrivent en retard » plutôt qu’aux trains qui arrivent à l’heure. Elle a insisté sur les travers de l’information en général qui privilégie l’accessoire au détriment de l’essentiel. Elle a souhaité s’arrêter sur l’affaire Eric Laurent en soulignant que cette affaire est grave car il y une violation flagrante du code de déontologie des journalistes. Dans le débat avec les autres journalistes présents et avec l’animateur et les participants, un consensus a été dégagé qui a été résumé d’une phrase « cette affaire de droit commun est entre les mains de la justice française et entre celles des instances qui gèrent la déontologie et l’éthique...

du journalisme en France ». Elle n’appelle pas d’autres commentaires.

Abderrahim Hafidi, journaliste à France Télévision, a également rappelé les principes de base du métier de journaliste et brossé un panorama de la manière dont est traitée l’information dans un monde caractérisé par la vitesse et les enjeux économiques qui rendent le journalisme tributaire des marchés. Il a également souligné le fait que le Maroc ne se met pas suffisamment en avant et participe par son système de communication un peu désuet à accréditer l’idée que c’est un pays tourné vers le passé alors même qu’il est en pleine mutation. Il a salué les progrès dans nombre de domaines y compris dans le domaine de la formation des imams

Aziz Boucetta pour sa part a pris le contrepied de ses confrères en disant que le Maroc n’était plus tourné vers l’Europe mais plutôt vers l’Afrique. Que les médias français ne rendent pas compte des évolutions du Maroc est leur problème et leurs choix éditoriaux les regardent. Bien entendu les seuls sujets qui intéressent les médias français sont les droits de l’homme et les inégalités lorsqu’il s’agit du Maroc et cela peut sembler injuste mais les Marocains n’accordent pas une grande importance à cela car les opinions publiques occidentales savent que le Maroc est un pays où règne la stabilité et qu’il connait un développement économique social et culturel important.

Les débats qui ont suivi ont permis de retracer l’histoire des médias français avec le Maroc en quatre grandes phases :

1/ Avant le protectorat l’image qui est mise en avant est celle d’un pays mystérieux, cet empire chérifien objet de toutes les convoitises et qui fascine ;

2/ Aux premières heures du protectorat le Maroc est présenté comme un El Dorado où il fait bon investir tout en jouissant de son exotisme

3/ Avec le manifeste de l’indépendance, seuls quelques grandes figures tel un Charles-André Julien ou un François Mauriac prennent la plume pour inviter la France àfaire revenir Mohammed V de son exil à Madagascar et à restaurer le Maroc dans sa souveraineté ;

4/ Le Maroc, devenu indépendant, bénéficie alors d’un état de grâce et d’un traitement objectif de la part des médias français puis, mais à partir des années 1970 les choses se gâtent et les « marronniers » des médias français sur le Maroc deviennent les droits de l’homme et les inégalités.

Les deux conclusions de ce débat ont porté sur deux points:

1/ les médias français n’abordent le Maroc que sous  deux angles : les droits de l’homme et les inégalités ;

2/ le citoyen français n’est pas bien informé sur le Maroc tel qu’il est aujourd’hui.

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